Il reste donc une question : « Comment atteindre l'entrée dans le courant ? » Il y a deux façons de le faire, une positive et une négative.
De façon positive, c'est sur la base de la concentration qu'apparaît la connaissance-et-vision des choses telles qu'elles sont. Lorsque l'on atteint cette connaissance, ce passage vers le transcendantal, alors on entre dans le courant.
La façon négative est de briser les trois premières entraves. Le bouddhisme parle de dix entraves qui nous lient à l'existence conditionnée. Si l'on brise ces dix entraves d'un coup, alors on passe du conditionné à l'inconditionné. Mais, généralement, on brise ces entraves de façon progressive. Voici les dix entraves :
La vue de la personnalité.
Le doute sceptique et l'indécision.
L'attachement aux règles morales et aux pratiques religieuses.
En brisant ces trois entraves, on atteint le point de non-retour.
Le désir de l'existence sensorielle.
La malveillance, l'aversion, la haine.
Ces deux entraves, dit-on, sont particulièrement puissantes. C'est en affaiblissant, pas même en brisant ces deux entraves, que l'on devient une « personne qui ne revient qu'une fois », une personne ayant dépassé le point de non-retour et très fortement sujette à la force d'attraction de l'inconditionné. Une telle personne n'a plus qu'une renaissance en tant qu'être humain, puis atteindra l'Éveil. En brisant ces quatrième et cinquième entraves, on ne renaît plus sur Terre mais à la périphérie du champ d'attraction du conditionné. Une telle personne atteint l'Éveil sans la nécessité d'une autre vie humaine.
Ces cinq premières entraves sont appelées les cinq entraves basses, et elles nous lient au champ gravitationnel du conditionné le plus fort et le plus dense.
Le désir pour l'existence dans le monde de la forme.
Le désir pour l'existence dans les mondes sans forme.
Ce sont les cercles du milieu et de l'extérieur du champ gravitationnel du conditionné.
L'orgueil, dans le sens où l'on se sent supérieur, inférieur ou égal aux autres.
A ce niveau spirituel, on ne fait plus de comparaisons du tout.
L'agitation, l'instabilité.
L'ignorance, ou l'absence de prise de conscience.
Ces cinq entraves hautes nous attachent aux cercles extérieurs du champ du conditionné. Une fois qu'elles sont brisées, on est libre, on n'éprouve plus que l'attraction de l'inconditionné, et il n'y a plus de renaissances. Une telle personne est nommée traditionnellement « Arahant », ou valeureuse, ou sainte. Revenons aux trois premières entraves…
‘The Higher Evolution’ © Sangharakshita, 1969, traduction © Centre Bouddhiste Triratna, 2002.