Vimalakirti se met dans un état de concentration profonde. Il déploie son pouvoir magique et grâce à cela toute l'assemblée est en mesure de voir la terre pure « Doucement parfumée par tous les parfums » du bouddha Sugandhakuta « Amas de parfums ». Et tandis qu'ils regardent tous, tandis qu'ils contemplent tous, émerveillés comme vous pouvez l'imaginer, quelque chose se produit dans la terre pure appelée « Doucement parfumée par tous les parfums ». Le bouddha Sugandhakuta s'assied pour prendre un repas avec ses bodhisattva. Apparemment, comme sur terre, il est 11h30 dans cette terre pure aussi. Et le repas est servi par une classe de divinités appelées « Gandavyuha », ce qui veut dire « glorieusement parfumé ». Toutes ces divinités, nous dit-on, se sont dévouées au Mahayana. Vimalakirti demande alors si quelqu'un veut aller dans cette terre de bouddha et rapporter un peu de leur nourriture. Mais personne n'est prêt à y aller. En fait c'est le pouvoir supranaturel de Manjusri, le bodhisattva de la sagesse, qui les empêche tous d'offrir d'y aller. Bien sûr, Manjusri veut que Vimalakirti fasse voir un exploit magique. Et c'est ce que Vimalakirti fait obligeamment. Grâce à son pouvoir magique il émane un bodhisattva incarné d'apparence jeune, orné de toutes sortes de signes et marques de bonne augure, et d'une telle beauté qu'il éclipse toute l'assemblée. On pourrait en dire beaucoup sur cette émanation incarnée, particulièrement comme servant de lien entre la terre pure « Doucement parfumée par tous les parfums » et notre propre monde. Mais nous devons continuer l'histoire. Vimalakirti dit à l'émanation incarnée d'aller dans la direction du zénith ; lui dit d'aller dans la terre pure appelée « Doucement parfumée par tous les parfums » ; lui dit de se courber en salutations devant le bouddha Sugandhakuta ; et le charge de dire que Vimalakirti demande les restes du repas du bouddha Sugandhakuta parce que, le charge-t-il de dire, avec ces restes, Vimalakirti accomplira l'œuvre du Bouddha dans l'univers appelé « Saha », la terre de bouddha appelé « Saha », « souffrance » ou « tribulations » et qui bien sûr, est notre propre monde, notre propre univers. Pour raccourcir une assez longue histoire, l'incarnation émanée va dans cette lointaine terre pure, obtient la nourriture, offerte dans un récipient parfumé et revient à Vimalakirti, non seulement avec la nourriture, non seulement avec le récipient, mais avec 90 millions de bodhisattva ! Et Vimalakirti bien sûr, les accommode tous dans sa maison. Et le parfum, la senteur de la nourriture qui a été rapportée se répand de part toute la grande ville de Vaisali, se répand en fait de part des centaines d'univers et tout le monde dans la ville de Vaisali remarque ce parfum merveilleux. Ils sont ébahis, remplis d'émerveillement, remplis de joie, remplis d'allégresse, et se sentent purifiés par cela, purifiés de corps, purifiés d'esprit et tous affluent vers la maison de Vimalakirti et y prennent place. Tous les dieux viennent aussi nous dit-on - dieux de la Terre, dieux du Royaume du Désir, dieux du Royaume de la Forme Pure ; tous viennent, tous sont attirés par cette senteur merveilleuse, ce parfum merveilleux, le parfum de la nourriture que l'incarnation émanée a rapportée de cette lointaine terre de bouddha, et tout le monde reçoit de cette nourriture à manger. Vimalakirti dit, tandis qu'il donne cette nourriture, tandis qu'il la distribue :
« Révérends, mangez de la nourriture du Tathagata, c'est de l'ambroisie, parfumée par la Grande Compassion, mais ne fixez pas votre esprit sur des attitudes d'étroitesse d'esprit car alors vous ne pourriez pas recevoir ce cadeau. »
Tout le monde mange alors, tout le monde est, bien sûr, satisfait, complètement satisfait par la nourriture mais bien que tant ait été mangé et qu'il y ait tant de gens, tant d'êtres, tant de dizaines de millions d'êtres, pour manger la nourriture, elle n'en est pas du tout diminuée. Après avoir mangé cette nourriture, cette ambroisie délicieusement parfumée, tout le monde fait l'expérience d'une félicité merveilleuse, d'une extase merveilleuse, et le parfum émane des pores de la peau de tous. Et le parfum qui s'émane est pareil à celui de la terre pure appelée « Doucement parfumée par tous les parfums ». Vimalakirti pose alors une question. Il demande aux bodhisattva qui sont venus de cette terre pure comment le bouddha Sugandhakuta enseigne-t-il son dharma, et ils répondent :
« Le Tathagata - le Bouddha de cette terre pure - n'enseigne pas le dharma au moyen de sons et de langage. Il ne discipline les bodhisattva qu'au moyen de parfums. Au pied de chaque arbre de parfum est assis un bodhisattva et les arbres émettent des parfums comme celui-ci. Au moment même où ils sentent ce parfum les bodhisattva atteignent la concentration appelée « Source de toutes les vertus du bodhisattva ».
À partir du moment où ils atteignent cette concentration, toutes les vertus de bodhisattva sont produites en eux ».
'The Inconceivable Emancipation - Themes from the Vimilakirti Nirdesa', © Sangharakshita, 1990, traduction © Centre Bouddhiste Triratna, 2002